samedi 20 mars 2010

Jusqu’où iront-ils ?

25 février 2010

Chacun sait qu’en matière d’élucubrations progressistes, les journalistes français tutoient les sommets. Si un Malien venait les trouver pour se plaindre de la discrimination qui pèse sur son pays en matière de sports d’hiver, ils relaieraient la plainte, et demanderaient le financement par l’Union européenne de patinoires couvertes à Bamako.

Vous souriez.

Vous avez tort.

Un des journalistes-blogueurs hébergés par Le Monde, notre quotidien du soir et de référence, vient en effet de consacrer un article à Lamine Gueye, auteur d’un ouvrage portant sur son combat pour la participation de sportifs issus des pays tropicaux aux Jeux olympiques d’hiver. L’esprit potache, j’arrive à suivre, merci bien. Moi aussi, je trouve amusant et sympathique de voir le Ghanéen Kwame Nkrumah-Acheampong dévaler les pistes en tenue léopard. S’il existait une association de soutien, je me fendrais volontiers de deux euros pour l’aider à financer sa participation.


Kwame Nkrumah-Achempong, le léopard des neiges

Mais stigmatiser « l’élitisme du Comité international olympique ou de la Fédération internationale de ski » ? Kwame Nkrumah-Acheampong est sans doute un brave garçon plein de bonne volonté, mais le fait est qu’il n’a pas neigé au Ghana depuis la dernière ère glaciaire ; malgré tous ses efforts, n’importe quel gosse de Val-d’Isère arrivera devant lui au slalom olympique. Il ne s’agit pas d’élitisme, il s’agit de faits.

Le journaliste nous parle aussi, avec des larmes dans la plume, « des petites nations du ski, de ces pays sans grade et sans neige qui n’ont pas la chance d’avoir d’hiver ou de montagne ». « Sans grade, sans neige. » Prolétaires sans neige de tous les pays, unissez-vous ! Non mais sans blague. « Pas la chance d’avoir d’hiver ou de montagne. » On croirait qu’il nous parle des petits enfants d’immigrés du 9-3 qui n’ont pas la chance d’aller au Louvre.

Je l’avoue, je suis perplexe. Que veulent ces gens ? Que l’ONU finance des stages de ski alpin pour les petits Congolais ? Une piste de descente indoor à Kigali ? (Pourquoi pas après tout, si je me souviens bien, c’est haut, Kigali, entre 1000 et 2000 mètres à vue de nez). Un échange Madagascar-Finlande, plongée sous-marine pour les Finlandais et ski de fond pour les Malgaches ?

Halte au feu, chers progressistes. Halte au feu, je vous en supplie. Il n’y a pas d’éléphants en liberté en Sologne, c’est « une chance » que les Français n’ont pas, mais nous avons accepté la réalité, et nous nous contentons désormais d’admirer ces imposants plantigrades au cirque Pinder et sur National Geographic. Que les Ghanéens acceptent de ne pas pouvoir aller patiner le week-end, ils ne s’en porteront pas plus mal (et d’ailleurs, ils feraient mieux de songer à récupérer la Coupe d’Afrique des nations, mais c’est une autre question). Il n’y aura jamais de marmottes au Burkina Faso, c’est bien triste, mais c’est ainsi.

Cela dit, souhaitons bonne chance à Kwame Nkrumah-Acheampong. Et comme disait un célèbre duo comique des années 90, « Surya Bonali, sur la glace, elle ressort bien ».

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